L'explosion du bastion des 18 ponts à Lille dans la nuit du 11 janvier 1916, a été choisi comme travail de 5ème année par un groupe d'étudiants de l'Insa Centre Val de Loire. A la lumière de leur analyse, de cet accident technologique majeur, on peut en déduire des informations importantes sur le plan historique. Des déductions très intéressantes sur cette explosion qui n'avait fait jusqu'à présent l'objet d'aucune étude scientifique.
Une visioconférence à l'initiative de la Société Géologique du Nord de l'Université de Lille reprendra ces travaux le 21 avril 2021.
Une expertise inédite sur la catastrophe des 18 Ponts à Lille en 1916
Si l’explosion de l’entrepôt de munitions allemand, le 11 janvier 1916, à Lille, a souvent été au centre du travail des historiens, c’est la première fois qu’une étude plus scientifique se penche sur la question. Un groupe d’étudiants de l’INSA à Bourges vient, en effet, de soutenir une thèse sur le sujet.
Un article de Frédérick Lecluyse publié le 29 mars 2021 dans la Voix du Nord (version numérique édition de Lille) et le mardi 30 mars 2021 (version imprimée édition de Lille).
L’explosion de l’usine AZF, en septembre 2001 à Toulouse, et plus récemment celle de Beyrouth, le 4 août dernier, ont à chaque fois remis la gigantesque déflagration du 11 janvier 1916 à Lille sur le devant de la scène des catastrophes majeures de l’Histoire. Cette fois, l’étude menée par des étudiants de l’Institut national des sciences appliquées (INSA) à Bourges fera moins de bruit. Mais elle demeure captivante. Car les futurs ingénieurs de l’école du Cher placent le drame des 18 Ponts dans la perspective d’un accident technologique majeur.
Formés dans la gestion du risque industriel, les étudiants s’intéressent à la cause de cette explosion – entendue à 150 km à la ronde – qui, rappelons-le, détruisit complètement le quartier Moulins et provoqua la mort de 104 habitants et d’une trentaine de soldats allemands. Comme à Toulouse ou à Beyrouth, c’est une substance chimique particulièrement instable qui opère une intéressante corrélation entre les trois catastrophes. À Lille, il s’agit de la mélinite. On sait par les historiens que les Allemands en avaient stocké 500 tonnes dans le bastion des 18 Ponts.
« Les Allemands ne pouvaient pas reconnaître la thèse de l’accident. »
Si les néo-ingénieurs évoquent tout à fait logiquement son inventeur, Eugène Turpin (1848-1927), dont la vie est un roman, ils se penchent donc longuement sur la ou les cause(s) de la déflagration. La thèse de l’origine criminelle développée par l’occupant est vite balayée. « Les Allemands ne pouvaient reconnaître publiquement une cause accidentelle », notent les étudiants, qui observent, en outre, qu’aucune mesure de rétorsion n’a lieu après le drame. La thèse d’une bombe lâchée par un avion britannique est aussi écartée. « Les possibilités techniques de l’époque ne le permettent pas. » La thèse la plus probable reste, par conséquent, celle de l’accident.
https://eugeneturpin.blogspot.com/2000/03/un-accident-technologique-majeur.html
Et, comme à Toulouse et à Beyrouth avec le nitrate d’ammonium, l’explosion du stock de mélinite est ici au cœur du mystère des 18 Ponts. Les étudiants explorent d’autres explosions survenues à l’époque dans des poudrières allemandes et livrent des analyses décoiffantes sur le souffle de ces explosions qui auront tué de Lille, en 1916, à Toulouse, en 2001. C’était aussi l’objet du livre publié en 2015 par le lillois Alain Cadet (1), lequel était d’ailleurs invité à la soutenance des étudiants de l’INSA, ce 23 mars à Bourges. Un bel hommage.
1. « L’explosion des 18 Ponts, un AZF lillois », aux éditions Les Lumières de Lille.
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Ce travail a donné lieu à un article paru dans La Voix du Nord le mardi 30 mars 2021